Introduction à la voltige 5/7
L’entraînement à la voltige
La voltige est une forme de pratique qui demande de voler énormément.
Pour vous donner une idée, sachez qu’à l’époque où j’avais mon meilleur niveau, je volais environ 600 heures par an.
Felix Rodriguez avoue ne jamais s’entraîner pour les compétitions de distance. Il vole avec sa voile de cross presque uniquement en compétition et cela ne l’empêche pas de faire de bons résultats en coupe du monde. En revanche, pour la voltige il est obligé de s’entraîner presque tous les jours pour conserver son meilleur niveau.
Découvrir en stage puis travailler à la maison
La pratique de la voltige ressemble à n’importe quel entraînement en pilotage.
Pour la phase de découverte, il est conseillé de travailler en stage de pilotage afin de profiter des conseils d’un moniteur et d’une sécurité optimale (liaison radio, plan d’eau, gilet de sauvetage, bateau) afin de limiter les conséquences des erreurs de débutants. De plus, le fait d’être filmé et de regarder ses évolutions le soir sur grand écran permet de faire le lien entre son ressenti et la réalité. Cela participe à une meilleure compréhension.
Mais en stage de pilotage on ne pratique pas beaucoup et certaines manoeuvres nécessitent un gros volume d’entraînement.
Par exemple avant de travailler l’hélicoptère il est conseillé de faire entre 100 et 150 décrochages et marches arrière. Cette manoeuvre peut être comprise assez rapidement. Lorsque le pilote ne commet plus les erreurs de débutant et qu’il a le “feu vert” de son moniteur, il peut s’entraîner “à la maison”, au dessus du sol et à ses risques et périls.
Savoir se positionner
Il est vrai que la voltige est une pratique engagée
mais l’avantage c’est que le pilote peut choisir où il engage !
Choisir le terrain idéal
Avant de pratiquer il convient de choisir soigneusement le terrain au dessus duquel se placer.
L’idéal est de choisir de grands champs dépourvus d’obstacle.
Mais une zone marécageuse, une tourbière, des dunes de sable voire une forêt bien dense peuvent très bien faire l’affaire.
En fait, toute surface qui ne s’avérera pas trop dangereuse en cas de d’ouverture du parachute de secours.
En revanche il faut absolument éviter:
- les zones urbanisées (habitations, usines…),
- les routes, voies de chemin de fer ,etc,
- les lignes électriques,
- les terrains rocailleux, les falaises, les glaciers…
- les plans d’eau (rivières, lac, mer…) sauf si vous êtes équipé d’un gilet de sauvetage et qu’un bateau vous surveille, prêt à venir vous secourir très rapidement.
Par ailleurs soyez capable de vous adapter en fonction du pays où vous êtes. Par exemple en France on peut compter sur l’hélicoptère de la protection civile et celui de la gendarmerie. De plus on dispose d’hôpitaux compétents et bien équipés. En revanche lorsque vous voyagez dans des pays moins développés augmentez vos marges de sécurité !
Calculer et tenir compte de la dérive
Il faut se positionner au dessus du terrain choisi en tenant compte de la dérive provoquée par le vent.
N’oubliez pas qu’un parachute de secours descend à environ 5 m/s soit 18 km/h.
Donc si le vent est à 18 km/h, votre dérive sous secours sera de 45°.
Garder de la hauteur
La hauteur / sol reste le principal élément de sécurité. Cela vous donne du temps pour tenter de vous sortir d’un problème et si besoin de faire secours.
Lorsque l’on ne maîtrise pas à 100% une manœuvre, on la travaille avec de la hauteur !
Voici un dessin qui résume tout ça.
Le plouf acrobatique en air calme
La pratique en air calme permet de se concentrer sur sa technique sans avoir à gérer l’aérologie. Lors d’un plouf, en général le pilote se positionne de manière à finir ses évolutions à proximité du terrain d’atterrissage, au vent, de manière à entrer directement en approche. Mais lors d’un plouf, même avec un peu de hauteur, le temps de pratique est court. Il faut replier, remonter au déco, déplier et, même en enchainant les ”ploufs”, le pilote n’accumule pas beaucoup de temps de pratique.
Prendre du gaz en thermique et pratiquer en air calme
Pour augmenter le temps de pratique, le mieux est de trouver un site permettant de monter assez facilement en thermique, puis de s’avancer dans un air plus calme pour pratiquer. Une fois la hauteur consommée, le pilote revient au relief, remonte, et recommence. Il enchaîne ainsi les sessions de voltige entrecoupées de sessions thermiques.
Dans le dessin ci-dessous, le pilote choisit de travailler au dessus de la forêt. Une ouverture du parachute de secours engendrera une grosse galère mais ne devrait pas être trop dangereuse.
C’est ainsi que l’on peut mettre un peu de volume de pratique.
Il y a un site mondialement reconnu que l’on appelle “la montagne magique” : le site d’Organya dans les Pyrénées espagnoles est très prisé des pilotes de voltige. Quand les conditions sont bonnes, les pilotes disposent de plus de 1000m de gaz toutes les 20 minutes. Ils arrivent à enchaîner facilement plus de 10,000 m de descente acrobatique par jour. Certains dépassent même les 20,000 m par jour en période d’entraînement avant les compétitions. Pour faire la même chose il faudrait 20 ploufs permettant 1000 m de travail où encore 32 vols en stage sur le lac d’Annecy, soit plus de 10 jours de stage ! Je vous laisse imaginer les progrès que l’on peut faire en 7 jours d’entraînement à Organya (ce qui correspondrait à 70 jours en stage).
La pratique en conditions ascendantes ?
Il est possible de faire de la voltige en condition thermique. Mais mieux vaut attendre la fin de journée pour avoir des conditions plus homogènes. Il est certain qu’une grosse turbulence peut compromettre le bon déroulement d’une manœuvre. Le pilote doit choisir des manœuvres qu’il maîtrise à 100%, et celles où la voile est toujours bien en pression. En général, une ascendance donne de l’énergie supplémentaire à la manœuvre. On peut la réaliser avec moins de frein. Mais attention, une descendance produit l’effet inverse : la voile manque d’énergie, il faut plus de frein pour la réaliser.
Quelques conseils
Ayez des objectifs raisonnables
En fonction du temps que vous pouvez consacrer à la pratique de la voltige, donnez-vous des objectifs abordables.
Vouloir maîtriser toutes les manoeuvres du répertoire demande un investissement à plein temps.
Bien visualiser
Lorsque l’on travaille la voltige et particulièrement de nouvelles manoeuvres, il est important d’avoir une bonne vision globale de la manoeuvre. Il faut la connaître théoriquement et connaître par coeur la succession de gestes qu’il faudra faire en se les répétant dans sa tête, en s’imaginant en train de les réaliser. Car tout se passe très rapidement et il faut être prêt à réaliser les bons gestes, prêt à faire face aux risques qu’engendre la manoeuvre. Il ne peut y avoir de place pour l’improvisation. Pour cela je recommande de regarder beaucoup de vidéos, de discuter avec vos moniteurs et d’autres pilotes, bref, de développer vos connaissances théoriques, votre culture de la manoeuvre.
Ne pratiquez pas tout seul !
Evitez de pratiquer la voltige tout seul dans votre coin. Comme toute activité engagée, il est préférable d’être accompagné. En cas de problème, quelqu’un doit pouvoir porter assistance et, si besoin, prévenir les secours.
De plus la pratique en groupe permet d’échanger les expériences. Les pilotes les plus aguerris peuvent vous donner de précieux conseils et vous faire gagner du temps et de la sécurité.
Prenez soin de votre matériel !
La pratique de la voltige est déjà assez engagée et il est possible de se mettre dans une situation délicate même avec un matériel en bon état. Mais voler avec du matériel mal entretenu c’est prendre des risques supplémentaires et inutiles !
Ne grillez pas les étapes !
Il faut prendre son temps pour progresser en voltige.
Ne pas prendre une voile trop petite trop vite.
Rappelez vous un des mes préceptes favoris :
Mieux vaut travailler sa technique sans engager plutôt que d’engager sans technique !
Dans les chapitres à venir, nous aborderons chaque manoeuvre techniquement avec des conseils pour progresser pas à pas.